Le Domaine de Bellevue est l’une des rares vanilleraies en culture biologique installée sur la côte ouest de La Réunion près de Saint-Louis.
Impossible de passer un séjour à La Réunion sans aller voir une vanilleraie et comprendre comment pousse et se récolte cet or noir que les plus grands chefs du monde s’arrachent. Cette orchidée Vanilla Planifolia est de toutes la plus parfumée. Ses capsules longues et fines renferment des grains d’une puissance aromatique extrême.
Dès le milieu du XIXe siècle, l’Île Bourbon, aujourd’hui La Réunion, devient le premier producteur de cette vanille si particulière qui pousse presque naturellement dans un climat fait pour elle. Malheureusement, l’introduction de cette plante liane s’est faite sans les insectes polinisateurs et, encore aujourd’hui, chaque fleur blanche du Domaine de Bellevue doit être fécondée à la main, soit plus de 45 000 fleurs et uniquement le matin.
Raison pour laquelle, au Domaine Bellevue, la famille Saint-Lambert déploie toutes les technologies pour faire pousser sa vanille à hauteur d’homme pour simplifier la récolte et, depuis quelques années, sous des serres photovoltaïques qui reproduisent l’environnement d’un sous-bois avec son ombrage permanent et son taux d’humidité. Une autre partie moins expérimentale de la production se fait encore sur le site historique de la famille, soit 40 hectares qui abritent les plantes endémiques des vergers comme le letchi, l’ananas et le longanis appelé également l’œil du dragon.
Nous avons pu visiter la plantation expérimentale de Saint-Louis perdue à flanc de collines et au milieu des incontournables champs de canne. Arrivés sur place en compagnie de Pierre Saint-Lambert, nous avons pu voir l’ensemble de l’installation qui permet d’obtenir cet or noir si parfumé. Ici, les lianes sont maintenues à hauteur d’homme sur des supports développés spécialement par la famille. Ils apportent une partie des nutriments nécessaires à la pousse et à l’apparition de la fameuse fleur blanche. Les gousses se développent alternativement de chaque côté de la liane et à chaque insertion sur la tige apparaissent souvent des racines aériennes permettant à la plante de s’accrocher à son support et parfois même à créer une bouture nouvelle. Épice savoureuse, la vanille sait se défendre car sa tige et ses feuilles secrètent un suc transparent très irritant pouvant provoquer des brûlures et des démangeaisons persistantes.
Des gousses sans saveur particulière, au début !
Deux mois après la fécondation, chaque fleur donnera une gousse qui atteindra sa maturité au bout de neuf mois. Le pédoncule à la base de la fleur se transforme en une gousse pendante et inodore longue de 12 à 25 centimètres et d’un diamètre de 7 à 10 millimètres.
Chaque gousse contient des milliers de grains minuscules qui tomberaient au sol en l’absence de culture organisée. Dès que les gousses atteignent leur couleur verte éclatante dite “queue de serin”, la méthode historiquement employée à La Réunion pour parvenir au produit final commence par ce que l’on appelle “tuer la gousse”, autrement dit un bref passage en échaudage. Elles sont ensuite placées en étuvage entre des couches de laine pendant plusieurs heures jusqu’à ce qu’elles perdent leur eau et que les enzymes leur donnent leur couleur noire chocolat. Les gousses sont alors récupérées pour être placées en clayettes pour un séchage pouvant prendre de deux à six semaines. La meilleure qualité s’obtient en commençant par une exposition au soleil puis un séchage final et doux à l’ombre.
Les gousses sont ensuite calibrées et réunies en bottes puis placées dans des caisses en bois de Tamarin pendant plusieurs mois où elles développent leur arôme et parfois même se cristallisent en surface pour donner la plus raffinée, la plus recherchée et la plus chère des vanilles.
Prêtes à l’emploi
Ensachées, mises en tube de verre (c’est l’idéal) ou encore transformées en différentes préparations trouvant toutes un débouché culinaire propre, les gousses sont maintenant prêtes à être consommées. Le Domaine de Bellevue possède une boutique en plein cœur de Saint-Louis où vous trouverez ses fameuses gousses qui lui ont valu de remporter la Médaille d’Or au Concours Agricole de Paris 2022. Lors de notre passage, le site n’était pas ouvert au public, mais la famille Saint-Lambert réfléchit à ouvrir ses portes. Alors si vous prenez contact bien avant votre voyage, il vous sera peut-être possible de visiter cette installation expérimentale ou d’assister à certaines étapes du procédé si vous êtes là durant la période de récolte.
Pierre Saint-Lambert et son équipe ne sont pas avares de conseils
et vous livrent 5 astuces pour bien choisir votre vanille :
1. Bien choisir l’origine. La vanille Bourbon d’un vrai producteur car tous les vendeurs ne sont pas producteurs… Éviter la vanille en vrac qui sèche rapidement et perd son taux d’arôme qui se mesure en vanilline. Il en faut au moins 2 % dans chaque gousse.
2. L’aspect et le parfum. Plus une vanille est longue de 16 à 20 cm, plus sa valeur est grande et plus elle a de graines de vanille à l’intérieur. Une gousse longue peut être coupée en deux et conservée. La gousse doit être légèrement brillante sans être luisante et surtout très souple. On doit pouvoir faire un nœud avec. Au nez, on retrouve des notes boisées, chocolatées, mais surtout pas de notes alcoolisées, synonymes de fermentation.
3. Les certifications. Indispensables pour savoir si une vanille de qualité a été cultivée et transformée suivant un cahier des charges établi par des organismes de certification.
4. Le conditionnement. Uniquement dans des emballages hermétiques.
5. La conservation. Le bocal ou le tube en verre sont les meilleurs contenants. Ils doivent être hermétiques et à l’abri de la lumière. Pas de conservation au réfrigérateur sous peine de dessèchement de la gousse.